L’interview "Entreprendre au féminin" d'Héloïse Lamotte, fondatrice de Mains d'Argent
Mains d'Argent est une société d'accompagnement gratuite pour les seniors faisant leurs courses en supermarché.
Pouvez-vous rapidement nous indiquer votre parcours scolaire et professionnel ?
J’ai grandi à Perpignan jusqu’en 2015, où je suis partie à Paris pour poursuivre des études en école de commerce. Lors de différentes expériences en stage, j’ai évolué dans un environnement start-up en tant que Partnership Manager pour une entreprise londonnienne sur le marché français, puis dans un grand groupe de luxe en marketing opérationnel pour une maison de cosmétiques. Ces expériences m’ont permis de comprendre les enjeux du commerce de proximité et de me sensibiliser à la fidélisation client, qui est devenue un fil rouge de ma carrière.
Parlez-nous de Mains d'Argent et de son histoire.
Mains d'Argent est née d’un constat simple : comment réinventer l’expérience client en magasin en apportant une utilité sociale : lutter contre l’isolement des personnes âgées ? Nous avons lancé les Compagnons d’Emplettes, un service où des étudiants accompagnent gratuitement des seniors pour faire leurs courses en supermarché, le tout financé par les enseignes partenaires. En une année, nous avons prouvé que ce modèle favorise à la fois la fidélité des clients et l’engagement des jeunes.
Pourquoi et comment vous êtes-vous lancée dans l'entrepreneuriat ? Y a-t-il eu un déclic particulier ?
L’idée a germé après avoir fait mes courses dans un supermarché où j’ai observé que pour les personnes âgées, souvent seule, cette activité devenait parfois compliquée à cause de leur âge, mais était surtout pour beaucoup seule sortie de la journée.
En parallèle, je côtoyais des étudiants cherchant des missions flexibles. Ce croisement de besoins a été mon déclic.
Créer votre entreprise, c’était une vocation, une obsession, une opportunité ou une nécessité ?
Un mélange des quatre ! C’était une vocation, car j’ai toujours eu des dizaines d’idées à la minute. Une obsession, parce que je n’ai pas lâché l’idée tant qu’elle n’était pas concrétisée. Une opportunité, car le marché était favorable. Et une nécessité, car je voulais participer à réinventer la façon dont nous considérons nos aînés dans notre société.
Quel fut l'avis de votre famille, de vos amis ?
Ils étaient très divisés ! Certains m’ont soutenue sans hésiter, tandis que d’autres étaient inquiets, surtout financièrement. J’ai su les rassurer rapidement.
Et j’ai surtout appris que la foi en soi est le meilleur moteur pour continuer à se surpasser.
Comment est-ce que vous avez passé le cap concrètement ?
J’ai commencé par tester l’idée à petite échelle. Une fois les premiers résultats obtenus, j’ai monté un business plan solide et cherché des partenaires. J’ai aussi beaucoup appris sur le tas, en ajustant le projet au fil des retours.
Quel a été votre investissement (temps, formation, argent) ?
Le temps est le plus gros investissement. J’y consacre tout mon temps depuis 3 ans maintenant. C’est le meilleur moyen d’avancer. Financièrement, j’avais quelques économies, 2000€ à peine, qui m’ont permis de créer un petit capital. J’ai également pu compter sur des subventions locales, en parallèle d’un modèle économique solide et viable qui naissait.
De l'envie de créer Mains d'Argent à sa création, combien de temps en tout et quelles étapes furent les plus dures ?
Environ un an. Le plus difficile a été de convaincre les premières enseignes partenaires. Il fallait les rassurer sur la viabilité du projet.
J’ai aussi rencontré beaucoup de difficultés lors des premiers recrutements. Personne ne nous forme à être manager, est les ressources humaines sont devenues pour moi l’aspect qui me demande le plus d’attention au quotidien en tant que cheffe d’entreprise.
Quelles sont les principales difficultés auxquelles vous avez dû faire face ?
La gestion des imprévus ! Entre les ajustements du modèle et les contraintes budgétaires, il a fallu rester adaptable en permanence.
Le fait d’être une femme a-t-il influencé votre façon de mener le projet ?
Je ne pense pas. Ma mission sociale était plus forte, je ressens encore aujourd’hui ce besoin vital de démontrer qu’on peut associer innovation et impact social, deux valeurs au cœur de mon entreprise.
Avez-vous perçu des différences de traitement selon votre sexe ?
Il m’est arrivé qu’on me prenne moins au sérieux. Je m’approche doucement de la 30aine (on me dit souvent que j’ai l’air d’en avoir 20), dans le social, solo-founder, je suis consciente que je dois redoubler d’efforts.
Mais j’ai appris à accepter cette singularité qui fait mon parcours. J’y apporte l’énergie nécessaire, sans m'épuiser, car tout cela n’est pas dépendant de ma volonté.
Créer sa boîte, c’est du bonheur ou du stress ?
Les deux ! On dit souvent que le métier d’entrepreneur c’est « gérer des problèmes au quotidien ». Ca annonce la couleur ! Mais je reste positive en lisant les témoignages positifs de personnes âgées qui bénéficient des Compagnons d’Emplettes.
Comme celui-ci, reçu ce matin par mail :
Bonjour, cela fait des mois que j'utilise votre service d'aides aux emplettes.
Particulièrement avec Isabelle et Stessy.
Je n'ai que des compliments, et points positifs à transmettre.
Vous devez d'ailleurs avoir des comptes rendus et photos de ma binette.
Merci.
Christian D.
Comment organisez-vous votre journée ?
Je commence tôt par un moment d’écriture pour clarifier mes priorités, puis j’enchaîne les réunions, les appels et les visites de terrain. Le soir est réservé aux tâches stratégiques.
Qu’est-ce qui est le plus fun dans votre quotidien d’entrepreneure ?
Rencontrer des profils variés et voir la satisfaction des clients seniors et des étudiants participants.
Travailler le week-end, c’est exceptionnel ou récurrent ?
Inconsciemment récurrent, officiellement exceptionnel ;) . Quand on est entrepreneure, notre esprit est constamment drivé par notre activité. Il faut le prendre de manière positive, cela permet de maintenir sa créativité et se challenger au quotidien.
Comment conciliez-vous vie privée et professionnelle ?
Avec une organisation rigoureuse et des moments réservés pour mes proches. C’est un équilibre fragile mais essentiel.
Avez-vous déjà subi du sexisme en tant que femme entrepreneure ?
Oui, mais je le prends comme un challenge pour prouver que nous avons notre place.
Quels mythes autour de l’entrepreneuriat faut-il déconstruire ?
Qu’il faut être expert en tout avant de commencer. On apprend en marchant.
« Entreprendre au féminin », ça a une signification particulière ?
C’est apporter une approche différente, plus inclusive et orientée vers l’humain.
Quelles sont les femmes entrepreneurs qui vous inspirent en ce moment ?
J’admire Pauline Laigneau pour sa vision, son charisme et son élégance, et Mélanie Perkins, la fondatrice de Canva, pour son audace.
Est-il important d’avoir des modèles ?
Absolument ! Ils nous rappellent que tout est possible avec du travail et de la résilience.
Si vous deviez donner un conseil aux femmes qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat, quel serait-il ?
N’attendez pas d’être « prête ». Lancez-vous et ajustez en chemin.
Que faut-il pour valoriser l'entrepreneuriat féminin ?
Plus de visibilité de parcours de de réussites.
Quelles sont les qualités d'une bonne entrepreneure ?
La persévérance, la capacité à écouter et l’audace.
Et si c’était à refaire ?
Je le referais sans hésiter, en étant encore plus rapide sur certaines décisions.
Héloïse, pour terminer, merci de poursuivre cette phrase : « Entreprendre au féminin, c’est… »
…oser transformer ses idées en actions et montrer que notre force est que nous sommes capables de tout.
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Allez les Françaises, Allez les Français – Novembre 2024
Crédits Photos : Mains d’Ar
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